Jeudi 9 mars, après de longues négociations, le gouvernement Vivaldi arrivait à un accord sur la migration. La majorité des mesures annoncées inquiète fortement les associations de défense des droits humains qui soulignent cependant une avancée : il est prévu d’enfin inscrire dans la loi
qu’un enfant ne peut pas être détenu du fait de son statut migratoire… Une promesse que la coalition Vivaldi avait déjà faite en septembre 2020 et qui mérite d’être concrétisée d’ici la fin de la législature… nous y veillerons.
Rappel historique des faits
En 2023, la Belgique peut toujours détenir un enfant qui n’a pas les bons papiers. Bref rappel des faits :
Les promesses sont une chose, mais si elles ne sont pas suivies de faits, elles n’ont aucune valeur et feront l’effet d’une poudre aux yeux. Nous, associations de défense des droits humains, veillerons à ce que d’ici la fin de la législature, le gouvernement respecte enfin sa promesse et inscrive dans la loi, noir sur blanc, l’interdiction de détenir un enfant du fait de son statut migratoire.
Enfermer un enfant a des impacts profonds et durables sur sa santé et son développement. Cela a été prouvé par d’innombrables expert·e·s, dont le célèbre neuropsychiatre Boris Cyrulnik qui souligne qu’ « il n’y a pas de bonne façon d’enfermer. L’enfermement est un trauma grave. ». Même des périodes de détention courtes peuvent affecter le bien-être psychique et physique des enfants et compromettre leur développement cognitif. Les expert·e·s en psychologie ayant travaillé avec des enfants de tous âges en centre de détention constatent que la détention provoque chez eux et elles un mutisme, de l’anxiété liée au stress post-traumatique, et même des comportements d’automutilation et tentatives de suicide.[1]
En 2018, Bernard De Vos, alors Délégué Général aux droits de l’enfant, avait rendu visite à une famille de 4 enfants né·e·s en Belgique et expulsée vers la Serbie après avoir été détenue en centre de détention. Il témoignait : « (…) pendant notre présence là-bas, on parlait de la Serbie avec un enfant de trois ans qui faisait le signe avec la tranche de la main sur son cou en disant : ‘Serbie ». Voilà, et ça à trois ans. C’est insupportable ». ».
La loi qui devrait être adoptée prochainement portera sur la détention d’enfants en centre de détention administrative. Pourtant, des enfants sont encore actuellement détenu·e·s en « maisons de retour » : il en existe 29 en Belgique. Moins connues, ce sont aussi des lieux de privation de liberté pour des familles migrantes. S’il ne s’agit pas de lieux fermés à clé, il s’agit bien d’une forme de détention qui ne dit pas son nom. L’enfant subit d’abord le traumatisme d’une arrestation. Il/elle est coupé·e de son entourage, doit endurer des restrictions de liberté importantes et des violations de ses droits à l’éducation, aux loisirs… et est finalement menacé·e·s d’être expulsé·e vers un pays qu’il/elle n’a parfois pas connu.
Ancrer dans la loi l’abolition de la détention d’enfants en centre fermé est un premier pas indispensable mais réellement mettre fin à cette pratique inhumaine doit aussi passer par l’interdiction de les détenir en maison de retour. Car un enfant migrant·e est avant tout un·e enfant et qu’on n’enferme pas un enfant. Point.
[1] Notamment, le Docteur Soorej Puthoopparambil Ph.D – Directeur du centre de collaboration de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à l’université d’Uppsala et auteur d’une récente étude de l’OMS sur les problèmes de santé liés à la détention dans la migration